Tu te souviens encore de la première fois où tu as appris l’alphabet de ta langue maternelle ? Sinon, il est possible que tu te souviennes de ta première année en primaire, quand tu essayais tant bien que mal de reconnaître les lettres et les syllabes, puis de les copier sur ton cahier.
En apprenant une nouvelle langue, notamment celles dont les systèmes d’écriture sont complètement différents de ceux des langues latines et germaniques que tu connais, tu auras l’impression d’être un enfant en train d’apprendre ses lettres. Tu auras peut-être ce sentiment si tu apprends le khmer par exemple.
Le khmer, langue officielle du Cambodge, est une langue qui peut demander des efforts supplémentaires, notamment lors de l’apprentissage de son alphabet. Si tu te sens un peu perdu au milieu de tous ces caractères et si leurs formes te paraissent compliquées à retenir, pas d’inquiétude. Cet article est pour toi !
Quelle langue parle-t-on au Cambodge ?
On a tendance à dire que le khmer est la langue parlée au Cambodge. Mais en réalité, de nombreuses langues sont parlées dans le pays, par les différentes ethnies qui s’y trouvent. En revanche, le khmer, lui, est la langue officielle du Cambodge (ភាសាខ្មែរ). C’est une langue môn-khmère qui est également présente dans certaines parties du Vietnam et de la Thaïlande, en raison de la proximité géographique des pays ainsi que de leur histoire commune.
Les différentes variétés du khmer
Si le khmer est une langue vernaculaire, celle communément parlée par la population cambodgienne, elle se décline tout en même en diverses variétés, selon les zones géographiques. On retrouve ainsi les variétés de khmer suivantes :
- le khmer standard ou central, parlé principalement au centre du Cambodge. C’est la variété utilisée pour l’instruction ;
- le khmer du nord, parlé dans le nord-est de la Thaïlande ;
- le khmer de l’ouest, parlé à Phnom Penh et dans les environs ;
- le khmer du sud, parlé dans le sud-ouest du Vietnam ;
- le khmer khe, parlé dans la province de Stung Treng, au nord du Cambodge.
Petit conseil : si tu souhaites apprendre le khmer par le biais de l’immersion totale et atteindre un niveau de maîtrise assez avancé, n’hésite pas à t’exposer aux différentes variétés de la langue afin d’entraîner ton oreille à reconnaître les différentes nuances de sons.
Apprendre l’alphabet khmer
L’apprentissage de toute langue commence par l’apprentissage de ses bases. Pour les langues au système alphabétique différent comme le chinois, l’arabe, ou encore le khmer, la maîtrise de leur alphabet et de leur système d’écriture est un aspect du parcours linguistique qu’il ne faut surtout pas négliger en faveur de la transcription phonétique.
Ainsi, pour apprendre le khmer, il te faudra passer par cette étape qui, une fois complétée, t’ouvrira de nouvelles portes dans ton parcours d’apprentissage. En apprenant à lire le khmer, tu auras l’occasion d’en découvrir plus sur la culture khmère et son histoire, mais aussi de trouver des supports d’apprentissage en khmer, que tu ne trouvais pas en français ou en anglais. Tu l’auras compris, apprendre l’alphabet khmer est essentiel pour toute personne souhaitant maîtriser la langue à un niveau intermédiaire ou avancé.
L’alphasyllabaire khmer
Le système d’écriture khmer repose sur un alphasyllabaire, aussi appelé abugida. Comme le thaï et le lao, le khmer tire son alphabet du pali et du sanskrit, deux langues indiennes anciennes, d’où leur ressemblance visuelle. Cependant, contrairement à ces deux langues, le khmer n’est pas une langue tonale, ce qui signifie que le ton avec lequel les mots sont prononcés en khmer n’a pas d’influence sur leur sens.
L’alphabet khmer compte 33 consonnes, 23 voyelles et 12 voyelles indépendantes. Chaque consonne de ce système possède deux formes : la forme avec un /ɑː/ inhérent (première série) et la forme avec un /ɔː/ inhérent (deuxième série) (lorsqu’elles sont isolées).
Le khmer s’écrit de gauche à droite, horizontalement, et les mots ne sont pas séparés les uns des autres. Les espaces sont employés pour délimiter les phrases.
Pour indiquer les voyelles, le khmer emploie des diacritiques (comme le thaï), qui sont des petits signes inscrits au-dessus des consonnes. Ils peuvent également se placer à droite, à gauche et en dessous de celles-ci. La prononciation des voyelles sera différente, selon la série de consonnes auxquelles elles sont attachées (première ou deuxième). Certains mots en khmer acceptent plus d’une orthographe.
Comment écrire le khmer ?
Il existe deux formes d’écriture en khmer moderne :
- L’écriture oblique, celle employée pour l’écriture manuscrite et les textes imprimés ;
- L’écriture ronde, un style de typographie ou les lettres sont en gras, utilisé pour écrire les titres de documents, de livres, et d’enseignes.
Comment apprendre l’alphabet khmer
Pour un débutant, les caractères en khmer peuvent paraître comme un amas de lignes et de boucles difficiles à distinguer les unes des autres. Et ceci est normal, ton cerveau n’étant pas encore habitué à des systèmes de langues aussi différents de ceux que tu connais. Apprendre l’alphabet khmer reste tout de même une étape qu’il est possible d’accomplir avec un peu d’entraînement et de persévérance.
Décortiquons un peu plus les étapes par lesquelles on te conseille de passer afin d’apprendre l’alphabet khmer sans trop de peine.
1. Apprends les consonnes
Commençons par les consonnes. Bien heureusement, il n’y en a que 33 dans l’alphabet khmer. Apprendre à les reconnaître est une étape complexe, mais leur prononciation peut également donner du fil à retordre pour certains. Comme dit précédemment, les séries de consonnes déterminent la prononciation des symboles de voyelles qui vont en dépendre.
Le caractère typographique ◌ montre la position d’un caractère khmer en dessous duquel une consonne souscrite est marquée.
Consonnes (première série)
Consonne | Consonne souscrite | Prononciation |
---|---|---|
ក | ្ក | kâ |
ខ | ្ខ | khâ |
ច | ្ច | châ |
ឆ | ្ឆ | chhâ |
ដ | ្ដ | dâ |
ឋ | ្ឋ | thâ |
ណ | ្ណ | nâ |
ត | ្ត | tâ |
ថ | ្ថ | thâ |
ប | ្ប | bâ |
ផ | ្ផ | phâ |
ឝ | ្ឝ | shâ |
ស | ្ស | sâ |
ហ | ្ហ | hâ |
ឡ | ្ឡ * | lâ |
អ | ្អ | qâ |
Consonnes (deuxième série)
Consonne | Consonne souscrite | Prononciation |
---|---|---|
គ | ្គ | kô |
ឃ | ្ឃ | khô |
ង | ្ង | ngô |
ជ | ្ជ | chô |
ឈ | ្ឈ | chhô |
ញ | ្ញ | nhô |
ឌ | ្ឌ | dô |
ឍ | ្ឍ | thô |
ទ | ្ទ | tô |
ធ | ្ធ | thô |
ន | ្ន | nô |
ព | ្ព | pô |
ភ | ្ភ | phô |
ម | ្ម | mô |
យ | ្យ | yô |
រ | ្រ | rô |
ល | ្ល | lô |
វ | ្វ | vô |
ឞ | ្ឞ | ssô |
Consonnes supplémentaires
Des consonnes supplémentaires existent dans l’alphabet khmer. Elles sont souvent employées pour les emprunts au thaï ou au français.
Consonne supplémentaire | Prononciation |
---|---|
ហ្គ | gâ |
ហ្គ៊ | gô |
ហ្ន | nâ |
ប៉ | pâ |
ហ្ម | mâ |
ហ្ល | lâ |
ហ្វ | fâ, wâ |
ហ្វ៊ | fô, wô |
ហ្ស | žâ, zâ |
ហ្ស៊ | žô, zô |
2. Apprends les voyelles
Après avoir appris à reconnaître les consonnes, tu peux passer aux voyelles. À l’origine, l’alphabet khmer en comptait 24. Cependant, avec une voyelle abstraite intégrée dans une consonne, on n’en compte que 23 maintenant. Les voyelles khmères ne sont pas très faciles à retenir du fait de leurs nombres et de leurs formes. Il te faudra donc un peu de temps pour toutes les maîtriser.
La série de consonnes initiales détermine la prononciation d’une voyelle.
Voyelles indépendantes
Les voyelles indépendantes incorporent à la fois une consonne initiale et une voyelle. Elles sont appelées voyelles complètes.
Forme souscrite | Prononciation |
---|---|
ឥ | ĕ |
ឦ | ei |
ឧ | ŏ |
ឩ | ŭ |
ឪ | ŏu |
ឫ | rœ̆ |
ឬ | rœ |
ឭ | lœ̆ |
ឮ | lœ |
ឯ | é |
ឰ | ai |
ឱ, ឲ | aô, aôy |
ឳ | âu |
Voyelles dépendantes
Forme souscrite | Prononciation dans la première série | Prononciation dans la deuxième série |
---|---|---|
អ | â | ô |
ា | a | éa |
ិ | ĕ | ĭ |
ី | ei | i |
ឹ | œ̆ | œ̆ |
ឺ | œ | œ |
ុ | ŏ | ŭ |
ូ | o | u |
ួ | uŏ | uŏ |
ើ | aeu | eu |
ឿ | œă | œă |
ៀ | iĕ | iĕ |
េ | é | é |
ែ | ê | ê |
ៃ | ai | ey |
ោ | aô | oŭ |
ៅ | au | ŏu |
Petite remarque : le nom de chaque voyelle dépendante se compose du mot ស្រៈ srăk [sraʔ] qui signifie voyelle suivie du son de la voyelle. Le tout est précédé d’un arrêt glottal (ʔ). Un peu comme si, en prononçant la voyelle “e”, on disait “voyelle e”.
3. Apprends à reconnaître les signes diacritiques
L’ajout de signes diacritiques peut modifier la longueur et la valeur des voyelles.
Marques diacritique | Nom en khmer | Fonction |
---|---|---|
ំ | nĭkkôhĕt | Un petit cercle inscrit sur une consonne ou une voyelle dépendante. Il nasalise la voyelle inhérente ou dépendante, avec l’ajout du son [m] à la fin. Les voyelles longues sont également raccourcies |
ះ | reăhmŭkh | Une paire de petits cercles écrits après une consonne ou une voyelle dépendante. Elle modifie et ajoute un son d’aspiration final /h/ |
ៈ | yŭkôleăkpĭntŭ | Une paire de points introduite assez récemment. Elle s’écrit après une consonne pour indiquer qu’elle doit être suivie d’une voyelle courte et d’un arrêt glottal |
“ | musĕkâtônd | Deux lignes verticales courtes. Placées au-dessus d’une consonne, elles sont employées pour convertir certaines consonnes de la série o en consonnes de la série a |
~ | treisâpt | Une tilde, écrite au-dessus d’une consonne. Ce signe est utilisé pour convertir quatre des consonnes de la première série en consonnes de la deuxième série |
ុ | kbiĕh kraôm | Inscrit sous une consonne, et utilisé à la place des diacritiques treisâpt et musĕkâtônd dans le cas ou elles seraient gênés par des voyelles en exposant |
់ | bântăk | Inscrit sur la dernière consonne d’une syllabe, il indique le raccourcissement de certaines voyelles |
៍ | tôndâkhéat | Sur la dernière consonne d’une syllabe, ce signe empêche la prononciation de celle-ci |
៎ | kakâbat | Ce signe indique l’intonation montante d’une exclamation ou d’une interjection. Il est souvent placé sur des particules telles que /na/, /nɑː/, /nɛː/, /ʋəːj/, et sur ចា៎ះ /caːh/, qui signifie oui (féminin) |
៏ | âsda | Employé pour indiquer qu’une consonne sans voyelle dépendante doit être prononcée avec sa voyelle inhérente, plutôt que comme une consonne finale |
័ | sanhyoŭk sannha | Ce signe se place au-dessus d’une consonne pour indiquer que la syllabe contient une voyelle courte particulière |
៑ | vĭréam | Partiquement obsolète, ce signe correspondant au virama en sanskrit, supprime la voyelle inhérente à une consonne |
Modification par les Diacritiques
Marques diacritiques | Première série | Deuxième série |
---|---|---|
អុំ | om | ŭm |
អំ | âm | um |
អាំ | ăm | ŏâm |
អះ | ăh | eăh |
អិះ | ĕh | ĭh |
អុះ | ŏh | ŭh |
អេះ | éh | éh |
អោះ | aôh | ŏăh |
4. Attention aux espaces et à la ponctuation
L’une des caractéristiques intéressantes de l’écriture khmère est la ponctuation et l’espacement, qui ont des règles différentes des autres langues.
Tu es peut-être habitué à écrire des phrases en utilisant des espaces comme séparateurs. En khmer, les espaces ne sont pas utilisés entre tous les mots en khmer écrit. Ils sont utilisés à l’intérieur des phrases, avec un emploi similaire aux virgules et aux points en français. Ils servent également à délimiter certains éléments tels que les chiffres et les noms propres.
Il reste intéressant de noter que le khmer moderne inclut parfois des guillemets français (dit en chevrons doubles) dans certains textes. Certaines marques de ponctuation khmère traditionnelles sont également employées de nos jours.
Ponctuation | Nom en khmer | Fonction |
---|---|---|
។ | khăn | Utilisé comme un point. Lorsque les phrases se suivent dans les idées, elles sont séparées par des espaces |
៘ | lăk | Equivalent à etc. en français |
ៗ | lékhtoŭ | Signe de duplication. Il indique que le mot ou la phrase précédente doit être répétée |
៕ | bâriyaôsan | Un signe, comme un point final, pour marquer la fin d’un texte entier |
៚ | koŭmot | L’équivalent d’un point marquant la fin d’un poème ou d’un texte religieux |
៙ | phnêkmoăn | Marque employée pour introduire un poème ou un texte religieux |
៖ | châmnŏch pi kuss | Utilisé comme un deux-points. |
5. C’est en forgeant que l’on devient forgeron !
Voilà donc une bonne quantité d’informations sur l’alphabet khmer et sur le système d’écriture de la langue. On te conseille de prendre le temps qu’il te faut afin de maîtriser les caractères sans trop de peine. Le khmer n’est finalement pas une langue si difficile.
En bref
On te conseille aussi de ne pas négliger l’entraînement à l’écriture, à la main, sur du papier, ou encore sur tablette, avec un stylet. Écrire te permettra d’activer ta mémoire kinesthésique et de retenir les caractères plus facilement grâce aux gestes de ta main. De nombreuses applications, comme L’application Ling, proposent des exercices d’entraînement à l’écriture du khmer, en plus des leçons de vocabulaire et des exercices de compréhension orale et d’expression orale. Trouve les supports qui te conviennent et lance-toi dans l’apprentissage de l’alphabet khmer. Avec de la régularité et de la persévérance, tu verras les fruits de tes efforts très rapidement !